Thèmes

La civilisation et l’éthique

Chapitre XXI

Le principe fondamental de la morale, ainsi reconnu comme une nécessité logique de la pensée, ne nous incite pas seulement à sérier et approfondir les notions courantes de bien et de mal, mais nous pousse à les élargir. Un homme n'est véritablement éthique que s'il obéit à l'obligation de secourir toute vie, lorsque la situation se présente et qu'il en a les possibilités, et s'il craint plus que tout de nuire d'une façon ou d'une autre à un être vivant. Il ne se demande pas jusqu'à quel point telle ou telle vie mérite qu'il lui accorde son intérêt, selon qu'elle aurait une valeur propre ou selon qu'elle serait capable d'éprouver des sensations ou pas. Pour lui, la vie est sacrée, en tant que telle. Il n'arrache pas étourdiment des feuilles aux arbres ni des fleurs à leur tige et il prend garde à ne pas écraser des insectes en passant. Si par une nuit d'été il travaille sous une lampe, il préférera laisser sa fenêtre fermée et respirer un air lourd, plutôt que de voir une hécatombe d'insectes aux ailes roussies s'abattre sur sa table.

Si en sortant sur la route après une pluie, il y aperçoit un ver de terre qui s'est fourvoyé là, il se dit que ce ver va dessécher au soleil faute d'être remis à temps sur un sol meuble où il pourra s'enfouir: il l'enlèvera donc du goudron fatal et le déposera dans l'herbe. Si en passant devant une grande flaque il y voit un insecte qui se débat, il prendra la peine de lui tendre une feuille ou un fétu de paille pour le sauver.

Il ne craint pas de faire sourire de sa sensiblerie.

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